Dans un rapport de 2020, le commissaire aux langues officielles soulignait que les onze institutions fédérales, ont la responsabilité de définir les exigences linguistiques des postes, avec le « même degré de rigueur et d’effort que s’il s’agissait de toute autre qualification essentielle requise pour le poste ».
Dans un nouveau document publié le 5 décembre, Raymond Théberge constate que, malgré les efforts déployés par les institutions pour appliquer ses recommandations, ces dernières n’ont été que partiellement ou non mises en œuvre.
Les 11 institutions concernées
- Agence des services frontaliers du Canada
- Services publics et Approvisionnement Canada
- Emploi et Développement social Canada
- Santé Canada
- Service correctionnel Canada
- Gendarmerie royale du Canada
- Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
- Agriculture et Agroalimentaire Canada
- Affaires mondiales Canada
- Secrétariat du Conseil du Trésor
- Services partagés Canada
Inégalités entre les institutions
Néanmoins, des disparités importantes subsistent entre les institutions gouvernementales. Certaines offrent des ressources complètes, incluant des politiques détaillées et des outils pratiques pour mettre en œuvre les exigences linguistiques, tandis que d’autres s’appuient uniquement sur des ressources externes, souvent mal comprises.
La consultation des spécialistes en langues officielles reste variable, parfois obligatoire, mais insuffisante dans plusieurs cas, souligne le commissaire.
J’ai […] constaté qu’une seule institution disposait d’un mécanisme pour résoudre les désaccords entre le personnel en langues officielles et les délégataires.
Raymond Théberge
Dans les autres institutions, c’est le gestionnaire qui décide ultimement des exigences linguistiques d’un poste, même si sa décision est contraire à l’avis du personnel en langues officielles.
De plus, les critères linguistiques restent limités pour les postes de supervision, particulièrement dans les régions bilingues, ce qui est jugé inadapté pour garantir la qualité et l’équité dans les deux langues officielles.
Enfin, la moitié des institutions ne disposent pas des trois éléments clés (politique, procédure, outil) pour évaluer objectivement les exigences linguistiques. Certaines ressources sont obsolètes ou incomplètes, ce qui reflète une mise en œuvre insuffisante des recommandations formulées il y a deux ans.
Les institutions doivent intensifier leurs efforts pour assurer une fonction publique respectant pleinement les obligations linguistiques, conclut le commissaire.
« Nous avons la responsabilité, comme gouvernement et comme ministre, de faire les suivis responsables pour assurer qu’on respecte la Loi sur les langues officielles et qu’on doit implanter cela. Plus tôt que plus tard. Et si c’est un peu tard, on doit se regarder dans le miroir. Ce n’est pas compliqué », a souligné le député néoécossais libéral, Darrell Samson, en entrevue jeudi.
Pas d’évaluation et un manque de suivi des formations
Le commissaire aux langues officielles pointe aussi du doigt le manque périodique d’évaluation des exigences linguistiques des postes au sein des institutions fédérales visées.
Bien que certaines disent effectuer des audits, elles n’ont pas fourni de détails concrets, comme la fréquence des examens ou des documents confirmant ces pratiques.
À ma grande déception, le suivi a révélé que les institutions ont fait très peu pour mettre en œuvre cette recommandation, et ce, bien qu’elles aient eu deux ans pour prendre des mesures.
Raymond Théberge
Aussi, si la plupart des institutions offrent une formation sur les exigences linguistiques, celle-ci est souvent recommandée et non obligatoire.
Le Conseil du Trésor applique partiellement les exigences
Le Conseil du Trésor, un des ministères responsables de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles, n’a pas respecté deux recommandations du commissaire, dont celle de se conformer aux exigences linguistiques auprès « d’intervenants clés », comme les champions aux langues officielles dans les institutions par exemple.
Le Conseil accuse plus de deux ans de retard, malgré l’élaboration d’un plan pour mettre pleinement en œuvre la recommandation d’ici 2025. «En effet, je souhaitais que les politiques et les outils soient révisés dans les deux ans de la publication de mon rapport de 2020, c’est-à-dire avant novembre 2022», rappelle Raymond Théberge.
Les incidences au non-respect de la Loi sont d’une portée considérable, estime-t-il. « Ne pas établir objectivement les exigences linguistiques entrave la capacité d’une institution à fournir des services au public dans les deux langues officielles. »