On a le choix
Delphine Petitjean
Rédactrice en chef et journaliste
Delphine est diplômée en études de la communication et des médias ainsi qu'en rédaction web et enseignement. Elle a débuté en presse écrite en Belgique, puis s'est dirigée vers le domaine de l'insertion professionnelle et de la formation. Au Canada, elle a été chargée de projet, a eu quelques collaborations en rédaction, avant de se former à la réalisation documentaire et de co-fonder On a le choix Média.
Un nom sur toutes les lèvres
« C’est le meilleur en ville. », voilà ce qu’on nous a dit de Gilles Plourde, le cordonnier de Water Street. L’homme nous confirme que tout le monde le connait pour son service et son implication communautaire. Il représente la dernière génération de l’entreprise familiale. Nous lui avons posé quelques questions sur son parcours.
Comment est-ce que tout a commencé ?
« Mon grand-papa a ouvert la cordonnerie en 1952. Il avait une cordonnerie à Montréal, mais il avait un autre travail. Tu sais, dans ce temps-là, le monde avait plus qu’un métier. Il a été transféré, ici, à Cornwall. Il a accepté puis après ça, ça s’est mis à mal aller parce qu’il travaillait dans une industrie et c’était pour fermer. Donc, il a décidé : je ne déménage plus la famille ! On a ouvert une cordonnerie et elle existe depuis ce temps-là, avec pas de téléphone, juste le bouche à oreilles. Et dans ce temps-là, il y avait des cordonniers partout. À Cornwall seulement, il y en avait 7. »Qu’est-ce qui a le plus de sens dans ton parcours, qu’est-ce qui est le plus important ?
« Donner un bon service au client et c’est sûr que le monde va revenir. Si tu es particulier, que tu es bon dans le travail que tu fais, encore là, c’est de bouche à oreilles et c’est d’être fier de ce qu’on fait. Et moi, je l’ai toujours été, ça vient de mon papa et mon papa, ça venait de son père. »De quoi en particulier es-tu le plus fier ?
« De voir que la cordonnerie fonctionne toujours et qu’elle est toujours occupée. Je me dis même que le jour où je ne suis plus ici, la cordonnerie Plourde, c’est fini. Moi, je suis la troisième génération, mais si quelqu’un d’autre prend ça, je pense que j’enlèverai le nom parce qu’on a toujours fait du bon travail et les gens sont satisfaits, mais si c’est quelqu’un d’autre… quel genre de travail il donnerait ? Juste avec le nom, je trouve ça important. »
Ce sont des métiers en voie de disparition, comment ça se fait que ça fonctionne encore, quel type de public vient te voir ?
« C’est tous les âges. J’ai vu vraiment les grands-parents, puis c’est une chaine, les grands-parents, les parents puis maintenant, les enfants. Donc, en voie de disparition… Il y en a beaucoup moins, oui. Si on prend seulement Cornwall, on peut faire un cercle d’une heure aux alentours de la ville et puis la clientèle vient dans ce rayon-là.
Oui, ça a beaucoup changé. Dans le passé, des semelles et talons, on en faisait beaucoup, toutes les semaines, moi et papa. Ça a pris une débarque, mais il y a d’autres genres de travail qui rentrent, comme beaucoup de corrections orthopédiques. La population vieillit, il y en a beaucoup qui ont besoin d’un remplacement de hanche et voilà que c’est du travail médical. Donc, moi, je me dis qu’un cordonnier quand même va toujours avoir du travail, va toujours avoir une demande, un besoin si tu veux.
Surtout que quand tu as un moulin à coudre, tu peux faire toutes sortes de travail : des réparations de toiles, etc. Donc, ce n’est pas juste strictement la chaussure. C’est pas un problème, un jeune pourrait reprendre le magasin ici et être occupé pour les prochains 30-40 ans. Il n’y a plus beaucoup de cordonniers, mais en faisant un peu de tout, la demande va toujours être là. »
Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui veut se lancer, quel talent faut-il ?
« Naturellement, il faut qu’il soit bien créatif. Essayer de trouver une façon de dire : oui je suis capable de réparer ça. D’être créatif et fier dans ce que tu fais. Ne pas juste dire : ce n’est pas réparable, mais plutôt, je peux le faire. »
Est-ce que tu as un souvenir particulier que tu voudrais partager ?
« Premièrement, c’est d’avoir travaillé avec mon père pendant toutes ces années-là parce qu’il y a beaucoup de monde qui disait : Mon Dieu, travailler avec ton père, ça doit être dur ! Non, c’est le contraire. Les deux, on était très ricaneurs puis on a eu un plaisir de travailler ensemble. C’est le fun aussi de voir le monde, voir le public, tu peux jaser un peu. C’est peut-être pour ça que je continue à travailler, que je ne suis pas près d’arrêter complètement. J’aime le public, j’aime le monde. »
Qu’est- ce que tu vas faire si tu t’arrêtes ?
« J’aide beaucoup les jeunes dans le soccer. Il y en a qui ont fait ça pour moi puis maintenant, je donne de mon expérience. C’est une manière de rester occupé. Je ne me vois vraiment pas à rien faire. Je vais rester ici aussi longtemps que j’aurai la santé. »
1 réflexion sur “La famille Plourde : trois générations d’artisanat et de fierté”
We have been to the shop for repairs in the past many times before and have had the pleasure to meet all 3 generations. They are far and few in between