Crise des opioïdes : opter pour la compassion

ON A LE CHOIX - La crise des opioïdes frappe le Canada depuis les dernières années. Au lieu de continuer à criminaliser les consommateurs, des approches communautaires concertées se développent pour les aider à obtenir les soins dont ils ont besoin.
Seringue

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Delphine Petitjean - Rédactrice en chef

On a le choix

Delphine Petitjean
IJL-Réseau.Presse-On a le choix

Rédactrice en chef et journaliste

Delphine est diplômée en études de la communication et des médias ainsi qu'en rédaction web et enseignement. Elle a débuté en presse écrite en Belgique, puis s'est dirigée vers le domaine de l'insertion professionnelle et de la formation. Au Canada, elle a été chargée de projet, a eu quelques collaborations en rédaction, avant de se former à la réalisation documentaire et de co-fonder On a le choix Média.

Raphaël on a le choix

On a le choix

Raphaël Machiels
Directeur Technique et Caméraman - Monteur

Raphaël est diplômé en Techniques Cinématographiques et en Développement Web. En Belgique, il a travaillé pour la télévision nationale, ainsi que pour les télévisions locales en tant que caméraman - monteur. Il a aussi oeuvré sur des captations de concerts et d'évènements sportifs. Au Canada, il a travaillé dans le Web avant de co-fonder On a le choix Média.

Chad Maxwell
Chad Maxwell - Chef adjoint de la police par intérim
Raphaël Machiels - On a le choix

Augmentation des surdoses

« On voit que c’est venu de l’Ouest pour arriver dans l’Est, à travers le Canada. Puis en Ontario, ici à Cornwall, je dirais que ça fait à peu près deux ou trois ans qu’on est vraiment dans la crise. », indique le Chef adjoint de la police par intérim, Chad Maxwell.

« On a vu une augmentation des visites à l’hôpital pour des crises de santé mentale et de la drogue. […] On a surtout vu une augmentation des morts par overdose. »

Pour 100 000 habitants (2022)
Nombre de décès présumés liés à la drogue dans notre région (ce nombre inclut tous les types de drogues, pas seulement les opiacés)
*Ces données sont préliminaires et sujettes à changement
Décès suspectés d'être liés à la drogue, 2022-2025
*Ces données sont préliminaires et sujettes à changement.
Le territoire du BSEO comprend les comtés unis de Prescott-Russell, les comtés unis de Stormont, Dundas et Glengarry et la ville de Cornwall.
Graphique de fréquentation aux urgences pour les opiacés
Nombre de décès présumés liés à la drogue dans notre région (ce nombre inclut tous les types de drogues, pas seulement les opiacés)
*Ces données sont préliminaires et sujettes à changement
Les données portent sur le nombre de cas survenus dans les quatre hôpitaux du territoire du BSEO (Hôpital communautaire de Cornwall, Hôpital Glengarry Memorial, Hôpital général de Hawkesbury et Hôpital Winchester District Memorial).

« On a toujours vu les opioïdes ici à Cornwall, que ce soit la cocaïne ou autres, mais c’est quand le fentanyl est venu en ville qu’on a vraiment vu des décès, c’est une drogue très dangereuse »

« On n’était pas préparés »

Depuis la dernière année, la police a mis en place une approche collaborative pour faire face à la problématique. « On n’était pas préparés et je dirais que présentement, la communauté, la police, l’hôpital, l’unité de santé de l’Est de l’Ontario, sont tous impliqués et on a un groupe formé pour gérer cette crise. On a une stratégie de sensibilisation. Il y a des années, on poursuivait les gens qui avaient de la drogue, on les mettait dans le système criminel. […] On a vu que l’ancien système ne fonctionnait pas, il y a de la récidive parce qu’ils [les usagers de drogues] n’ont pas l’aide dont ils ont besoin. »

Saisie d'argent et de drogue, police de Cornwall
Saisie d'argent et de drogue, police de Cornwall

Intervention sur le trafic et unité de crise

« Nos efforts sont surtout sur la répression des trafiquants. L’année dernière, nous avons saisi 1, 2 millions de dollars de drogues […]. C’est là que tu fais mal aux organisations criminelles. », souligne Chad Maxwell.

« On reste dans une région qui a toujours été exploitée par les groupes criminels. À cause de notre juridiction, on a le Québec, l’Ontario, l’État de New York, Akwesasne. […] Dans le dernier mois, on a saisi du cannabis, de la cocaïne, du fentanyl… […] Quand il y a des problèmes sociaux, il y a toujours une connexion avec la criminalité. On met surtout nos efforts sur la prévention. On a une équipe mobile d’intervention de crise. Dans deux semaines, on va lancer la deuxième. C’est un partenariat avec l’hôpital communautaire de Cornwall et la police où nous avons une infirmière spécialisée en santé mentale et dépendance et un officier de police. »

Nouveau traitement disponible aux urgences

L’hôpital communautaire de Cornwall fait partie de cette approche collaborative. Récemment, un partenariat a également été lancé avec la clinique Recovery Care dans le cadre de l’administration de la première dose de Suboxone.

Hôpital de Cornwall
Hôpital de Cornwall
Raphaël Machiels - On a le choix
Lorne Scharf - médecin urgentiste
Raphaël Machiels - On a le choix
« C’est un mélange de buprénorphine avec un autre médicament, le naloxone. Le buprénorphine est un narcotique et le naloxone, c’est contre les narcotiques. Quand quelqu’un prend un surdosage, on donne le naloxone par injection. Le buprénorphine, c’est comme la méthadone, un opioïde de longue durée. », explique le Docteur Lorne Scharf, médecin urgentiste.
La première dose de Suboxone peut être administrée dès l’apparition de symptômes de sevrage légers à modérés (généralement 12 à 24 heures après la dernière consommation d’opioïdes).

Ça évite des problèmes quand on arrête parce que le problème des addictions aux opioïdes est que les symptômes d’arrêt sont très sévères, avec des frissons, des vomissements, des crampes. Avec un médicament longue durée, nous pouvons baisser le dosage puis arrêter complètement. C’est une façon de briser le cycle de l’addiction.

Répondre présents pour enrayer la spirale

« Nous savons que si nous commençons ici, nous pouvons presque doubler les chances de succès et nous avons des partenaires dans la communauté pour le traitement. C’est très important d’avoir les médecins de famille, les travailleurs sociaux, les psychologues, d’avoir des liens pour avoir une continuité de soin. Recovery Care peut prendre soin des patients après que nous commençons le traitement ici. Nous avons toujours des options pour traiter les symptômes aigus, mais nous voulons adresser le problème d’addiction aux opioïdes dans les situations de crise, quand les patients se présentent ici à a salle d’urgence parce que s’ils se présentent, nous pensons que la porte est ouverte aux suggestions. C’est qu’ils veulent faire quelque chose. », souligne le Docteur Scharf.

« Il y a plusieurs raisons qui peuvent mener à l’addiction. Quelques fois, on commence avec le traitement pour une douleur aigüe. »
Le médecin évoque ici les médicaments sur prescription ou achetés sans consulter un médecin. Il met l’emphase sur une spirale de problèmes de santé, juridiques et financiers ainsi que sur l’isolement social qui découle de la dépendance.

« Nous sommes tous vulnérables aux addictions. », précise-t-il.

« Nous sommes les médecins qui commencent le traitement. C’est difficile de trouver un psychiatre avec une spécialisation dans ce domaine. »

Chad Bouthillier
Chad Bouthillier - Travailleur social dans un établissement pour toxicomanes à Ottawa
Raphaël Machiels - On a le choix

Consommation supervisée

Chad Bouthillier a connu la polydépendance. Sobre depuis 14 ans, il est aujourd’hui travailleur social dans un établissement pour toxicomanes à Ottawa.

« La Roulotte est un service 24 heures. Quand vous devenez un client, vous pouvez consommer sous supervision et être pris en charge par un gestionnaire de cas. Nous travaillons sur des buts : typiquement, vous voulez avoir des documents d’identité, votre carte de santé, rentrer en contact avec votre famille ou voir un médecin. Ils viennent ici, disent « Je sniffe ou je m’injecte. » Nous leur donnons des outils propres, ils vont à leur cabine. Ils font leur injection. S’ils ne sont pas en surdose, il y a toujours un rapport sur les clients. Nous savons tout ce qui se passe pour eux, nous prenons des notes et nous nous reconnectons avec eux pour leur demander comment s’est passé leur rendez-vous et comment ils vont. », explique-t-il.

Notre but est que les gens choisissent leur succès et ça commence par le fait de venir ici pour avoir des soins propres. Ils utilisent des aiguilles propres pour éviter les hépatites et le VIH. Si ce service n’était pas là, ce serait une charge supplémentaire sur le système de santé et les contribuables.

seringues
Seringues usagées
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De l’espoir

« Les raisons pour lesquelles les gens utilisent la drogue, c’est le mal, et spécifiquement le mal émotionnel. », explique Chad Bouthillier.

« Le problème, spécialement avec le fentanyl, c’est que tu deviens dépendant. […] Tu essaies d’éviter le mal et aussi de ne pas te sentir malade et avant que tu t’en rendes compte, tu en as besoin tous les jours. » Le travailleur social souligne que la majorité de ses clients sont des hommes, peu habitués à partager leurs émotions et qui se réfugient dans la drogue.

Il confirme que les traitements au Suboxone offerts dans la région fonctionnent. « J’ai vu des succès : des gens qui utilisaient le fentanyl tous les jours, en utiliser moins, utiliser leur médicament prescrit, pour finalement ne plus utiliser que leur médicament prescrit et qui sont maintenant logés, qui travaillent »

Étudiante en travail social, Hannah Pearce effectue son stage de dernière année à La Roulotte. Sa vocation lui vient de son histoire familiale. « Je sais l’effet que la dépendance peut avoir sur les individus et je sais qu’ils ont besoin de soutien. Je n’ai pas peur, ces gens sont gentils, ils veulent parler. », souligne-t-elle.

Hannah Pearce
Hannah Pearce - Étudiante en travail social
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Une vison compassionnelle confirmée par Chad Maxwell, le chef adjoint par intérim de la police de Cornwall. « C’est toujours le même mélange : la pauvreté, la dépendance et la santé mentale. Ce sont trois choses que nous voyons régulièrement. Le déterminisme social du crime est très similaire au déterminisme social de la santé. La crise des opioïdes n’est pas autre part, ce n’est pas caché. Ça affecte les gens, les familles et toute la communauté. Si vous voyez quelqu’un qui se débat avec ça, demandez de l’aide. », conclut-il.

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