Dans son énoncé économique d’automne présenté le mercredi après-midi 30 octobre, le ministre des Finances Peter Bethlenfalvy officialise des promesses faites par son gouvernement au cours des dernières semaines.
Cela comprend, entre autres, des bourses d’études pour encourager les étudiants en médecine de rester en Ontario pour y travailler, des crédits d’impôt aux parents pour les traitements de procréation assistée, et une nouvelle prolongation de la réduction de la taxe provinciale sur l’essence.
« Malgré les progrès réalisés par notre gouvernement au cours des six dernières années, la province est toujours confrontée à d’énormes défis, de la croissance démographique historique à l’incertitude géopolitique, en passant par le coût de la vie qui demeure élevé », a déclaré le ministre Bethlenfalvy dans un discours suivant le dépôt du document fiscal à l’Assemblée législative de l’Ontario.
Déficit important
Alors que le gouvernement Ford accuse toujours un déficit important, le ministre réitère tout de même son plan de remettre des chèques de 200 $ à 15 millions d’Ontariens, coûtant aux contribuables 3 milliards de dollars.
« Aujourd’hui, nous sommes en mesure d’en faire plus, construire davantage et remettre plus d’argent dans les poches des contribuables ontariens », a soutenu le ministre des Finances.
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Même les milliardaires recevront le chèque de 200 $ de Doug Ford
Dans son budget annuel déposé en mars dernier, Peter Bethlenfalvy prévoyait un déficit de 9,8 milliards de dollars pour 2024-25, soit presque 10 milliards de plus que l’excédent de 200 millions qu’il avait précédemment projeté.
Le ministre des Finances parle maintenant d’un déficit de 6,6 milliards de dollars dans son document déposé mercredi.
En 1999, le gouvernement de l’Ontario avait également distribué des chèques à tous les résidents, mais seulement après avoir équilibré les coffres.
Le plan du gouvernement Ford d’envoyer des chèques aux Ontariens l’obligera à emprunter de l’argent, ce qui augmentera la charge de la dette et les paiements d’intérêts du gouvernement.
Depuis que les progressistes-conservateurs de Doug Ford sont arrivés au pouvoir en 2018, la dette nette de l’Ontario a grimpé de façon considérable.
Elle a atteint 429 milliards de dollars cette année, selon l’énoncé de mercredi, soit 106 milliards de plus que cette dette laissée il y a six ans par le gouvernement libéral.
La province affirme néanmoins que sa situation d’endettement s’améliore par rapport au produit intérieur brut (PIB).
Le ratio de la dette nette au PIB de 37,8 % devrait être inférieur cette année à ce qui était prévu dans le budget annuel présenté en mars, et moins élevé que les niveaux observés au cours des dix dernières années.
Les partis d’opposition ont qualifié l’idée d’envoyer des chèques aux Ontariens, dans un contexte budgétaire non-équilibré, de « pot-de-vin » et de tactique pré-électorale.
Les rumeurs voulant que le gouvernement Ford se préparerait à lancer une élection provinciale au printemps 2025, soit un an avant les élections prévues de juin 2026, circulent depuis plusieurs mois à Queen’s Park.
Libéralisation des ventes d’alcool
La province a récemment confirmé le versement de 225 millions de dollars au Beer Store pour mettre fin à ses droits de vente d’alcool.
Malgré ces importants changements à la façon dont l’alcool est vendu en Ontario, très peu de détails avaient jusqu’ici été présentés aux Ontariens, et le gouvernement n’avait pas encore précisé si la Régie des alcools (LCBO) allait perdre des revenus en raison de cette entente.
Plus d’informations sont maintenant disponibles: la libéralisation des ventes d’alcool aura un impact néfaste sur les revenus de la LCBO à court terme, mais la part du marché de la société d’État devrait s’accroître à long terme, prévoit le gouvernement Ford.
Le gouvernement prévoit une augmentation de la part de marché de la LCBO à long terme, qui découlera principalement de son rôle de grossiste auprès des nouveaux dépanneurs et épiceries.
Selon l’énoncé économique, les revenus projetés de la LCBO pour 2026-27 s’élèveront à 8,5 milliards de dollars, soit 800 millions de plus que ceux projetés dans le dernier budget annuel.
À court terme, toutefois, le revenu net de la LCBO sera inférieur aux prévisions du budget de 2024, selon le ministre.
La province blâme de prime abord le conflit de travail de juillet 2024, lorsque les employés de la LCBO ont fait la grève — une première dans l’histoire de l’Ontario — pour demander de meilleures conditions dans le contexte de la réforme de la vente d’alcool en province.
Les libéraux de l’Ontario ont avancé que le plan de la province pourrait coûter jusqu’à un milliard aux contribuables, mais le ministre des Finances a réfuté cette analyse.
Logements
L’Ontario, qui prévoit créer 1,5 million de foyers d’ici 2031, n’a pas réussi à atteindre ses cibles de construction de logements à travers la province au cours des deux dernières années.
Le gouvernement a décidé d’inclure les nouveaux foyers de soins de longue durée à cette cible, mais il manquait quand même près de 1000 foyers pour atteindre l’objectif annuel de 110 000 logements, à la fin de 2023.
Pour 2024, l’Ontario planifiait de créer 125 000 logements.
Or, dans le dernier budget annuel, le ministre des Finances prévoyait qu’il y aurait moins de 88 000 mises en chantier avant la fin de l’année.
Et il revoit maintenant cette cible à la baisse.
En 2025, le prix moyen des foyers de la province devrait grimper encore plus (4,7 l%) que ce que prévoyait Peter Bethlenfalvy dans son budget annuel, en mars dernier (3,1 %).
Le ministre des Finances prévoyait aussi, dans son budget annuel, que la revente de logements augmenterait de 4 % en 2024, et de 16 % en 2025.
Dans son énoncé économique, il a révisé à la baisse ces projections: la province prévoit maintenant que la revente de logements n’aura augmenté que de 2 % cette année, et de 13,4 %, l’an prochain.
Élections américaines
Le ministre des Finances de l’Ontario estime que les « développements géopolitiques et l’évolution de la politique commerciale, aux États-Unis notamment », pourraient avoir des répercussions sur l’économie de la province.
L’Ontario exporte 252,4 milliards de dollars de marchandises à travers le monde. Un peu plus de 81 % de ces exportations sont destinées aux États-Unis, selon Statistique Canada.
Les « dangers » qui surplombent l’économie des États-Unis pourraient aussi avoir des répercussions sur l’Ontario, peut-on lire dans le document fiscal.
La publication de l’énoncé économique d’automne survient d’ailleurs habituellement lors de la première semaine de novembre, mais le ministre Bethlenfalvy l’a devancée d’une semaine, cette année, pour ne pas qu’elle coïncide avec les élections américaines, le 5 novembre prochain.
Les conflits au Moyen-Orient et en Ukraine pourraient aussi alimenter l’inflation à court terme en perturbant les chaînes d’approvisionnement et en augmentant le coût des biens importés, prédit le gouvernement ontarien.
La province craint aussi qu’un « risque de protectionnisme accru » pourrait « raviver les goulots d’étranglement » et « entraver les échanges commerciaux avec les principaux partenaires de l’Ontario ».