Identité autochtone : la langue comme pilier

ON A LE CHOIX - La Journée nationale des langues autochtones est célébrée le 31 mars. Au-delà d’une histoire sombre, des membres de la communauté mohawk d’Akwesasne œuvrent au quotidien pour cultiver leurs racines.
Joyce King - Directrice générale Native North American Travelling College

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Delphine Petitjean - Rédactrice en chef

On a le choix

Delphine Petitjean
IJL-Réseau.Presse-On a le choix

Rédactrice en chef et journaliste

Delphine est diplômée en études de la communication et des médias ainsi qu'en rédaction web et enseignement. Elle a débuté en presse écrite en Belgique, puis s'est dirigée vers le domaine de l'insertion professionnelle et de la formation. Au Canada, elle a été chargée de projet, a eu quelques collaborations en rédaction, avant de se former à la réalisation documentaire et de co-fonder On a le choix Média.

Raphaël on a le choix

On a le choix

Raphaël Machiels
Directeur Technique et Caméraman - Monteur

Raphaël est diplômé en Techniques Cinématographiques et en Développement Web. En Belgique, il a travaillé pour la télévision nationale, ainsi que pour les télévisions locales en tant que caméraman - monteur. Il a aussi oeuvré sur des captations de concerts et d'évènements sportifs. Au Canada, il a travaillé dans le Web avant de co-fonder On a le choix Média.

Traumatisme intergénérationnel

« Du côté des États-Unis, ma mère était scolarisée dans l’État de New York et l’établissement a rassemblé toutes les mères pour leur dire que l’apprentissage de la langue mohawk interférait avec l’école. Ils ont dit que si elles voulaient une meilleure vie pour leurs enfants, elles devaient arrêter de nous parler en mohawk. Et elles l’ont cru parce qu’on sortait de la Grande Dépression et de deux guerres mondiales et bien sûr, elles souhaitaient ce qu’il y a de mieux pour nous puisque nous ne pouvions plus rester sur nos terres, nous n’avions plus ces endroits où nous pouvions chasser les cerfs ou cultiver notre jardin. », explique Joyce King, directrice générale du Native North American Travelling College à Akwesasne.

« Du côté canadien, mon père allait dans une école catholique qui disait de punir les enfants qui parlaient mohawk. Quand mes parents nous ont élevés, ma mère ne maitrisait plus la langue et mon père, qui parlait très bien, mais qui avait peur que nous soyons sanctionnés, disait que c’était le travail de ma mère de nous apprendre. »

Apprendre plus tard

Joyce King a grandi avec la grammaire anglaise. « Ça a été difficile pour moi d’apprendre le mohawk plus tard parce que, si vous saviez, c’est une belle langue, ça décrit tous les détails, sans aller dans un récit élaboré. Juste par un mot, on peut raconter l’histoire d’une personne. Par exemple, mon nom est Tekahnawiiaks et ça veut dire : « Elle a traversé le courant et elle est revenue ».

Joyce tient son patronyme du clan de la Tortue. « Les gens nous demandent si c’est parce que nous sommes lents, mais pas du tout, ça signifie que nous sommes les médiateurs. », précise-t-elle.

Je voulais désespérément apprendre ma langue, pas seulement pour moi, mais pour mes enfants. J’ai mis ma fille dans l’Akwesasne Freedom School. Je ne voulais pas lui prendre ce qu’on m’avait pris.

La représentation de l’identité

« Ce qui est encapsulé dans ces mots, c’est notre identité. Tout dans cette langue est la description de ce que nous avons fait. La traite, les accords avec les gens de la Couronne, les revendications territoriales… c’est dans nos cérémonie. Ces choses sont la façon dont nous nous connectons à notre création, notre vision du monde. ».

« De ma génération aux années 2000, juste à peu près une personne ici parlait le mohawk à cause de cette assimilation et du fait que nous n’avions nulle part où aller pour apprendre. Et finalement, il y a eu la Journée de la vérité et de la réconciliation et un regard sur ce processus d’assimilation, une mise en valeur de notre langue. Il y a une résurgence pour l’apprendre à nouveau, mais nous perdons rapidement nos locuteurs. Il n’y a pas assez de fonds pour eux. Ce jour national est bon pour la sensibilisation, mais nous avons besoin aussi de soutien pour ces locuteurs natifs dans notre communauté. Il peut y avoir des cours dans le système public, mais il faut être exposés 24 heures sur 24. La sensibilisation doit se faire dans notre propre communauté pour ne pas devenir une société anglophone. », insiste Joyce.

À lire aussi : Vérité et réconciliation à Cornwall : une journée placée sous le signe de l’amitié

Un équilibre entre deux mondes

Ranen Rihiostha a 19 ans. Il est éducateur culturel pour le Native North American Travelling College. Avec ses collègues, il se rend dans les garderies, les écoles et les universités pour introduire les enfants et les étudiants aux danses et chants mohawks.

Je suis très chanceux d’être né dans une famille très traditionnelle. Mon père aidait avec les enseignements et les cérémonies à Akwesasne.

Le jeune homme a été scolarisé à l’Akwesasne Freedom School. « Nous allions dehors et apprenions les plantes médicinales qui peuvent être utilisées. La plupart des enfants qui sont allés à cette école parlent toujours la langue, comme moi. Ça va juste jusqu’à la 8e puis tu peux choisir de rester au-delà, mais il n’y a pas de diplôme. »

Pour son secondaire, Ranen a donc décidé de fréquenter un établissement public à Cornwall. « Ma première école m’a vraiment enseigné qui j’étais comme mohawk, j’ai ces racines en moi depuis petit. L’école secondaire m’en a appris plus sur nos voisins et sur les compétences modernes. C’est un équilibre avec lequel je vis. Nous avons besoin des apprentissages des deux sociétés. », estime-t-il.

« Quand je suis allé à l’école secondaire, j’ai oublié les enseignements, je réapprends toujours. Mais la plupart de mes pensées sont en mohawk et en rapport avec ce que j’ai appris, inconsciemment. Je croyais que tous les enfants savaient ça, les cérémonies, etc., mais nous sommes juste une minorité. »

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2 réflexions sur “Identité autochtone : la langue comme pilier”

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